Les regards qui se croisent sur l organisation établissent des images mentales et artefactuelles sur le travail et ses responsables qui approvisionnent le marché médiatique de la croyance.
Même unanimement ignorées, ces images ne seraient pas pour autant erronées. Même unanimement adoptées, elles ne deviendraient pas pour autant des vérités.
Dans une démocratie légitimée par l opinion, les propositions de lois à partir desquelles se déclinent les budgets et les normes, dépendent des images majoritairement partagées, erreurs et vérités confondues.
Pour appréhender les images établies sur le travail et ses responsables, puis évaluer leur pertinence, 21 chercheurs ont collecté 1150 images transitant par divers canaux (31 portraits, 140 questionnaires, 160 cartes cognitives, 177 ouvrages, et 642 Rex).
Force est de constater que les images du travail-souffrance et du responsable-harceleur « occupent » les trois quarts des espaces discursifs alors qu elles ne décrivent que 5 % à 15% de la réalité vécue par les salariés.
On peut légitimement questionner la portée de ce déploiement inflationniste qui flirte avec ce qu il convient de nommer falsification ? Formulation psychosociale des luttes salariale et politique contre le travail, cette imagerie se nourrirait-elle de la révolte contre le père, pour entretenir celle contre l autorité et contre ses équivalents symboliques ? Exigence maternelle d une compassion providentielle, cette imagerie, en entretenant une régression généralisée, abreuverait-elle les media et les élus ?
Dans une Europe en déclin, est-il possible que cette transgression de la Moïra , loi qui impose à chacun le devoir d assumer sa part de malheur, accélère la Némésis en France, comme en Grèce début 2010 et que cet effondrement impose aux Français une époque inédite de fortes restrictions sociales, en même temps qu un vif retour à la responsabilité individuelle dans l obtention de ressources ?