Le contexte
En deux décennies, le contexte dans lequel évoluent les entreprises a changé et le corps social des entreprises est soumis à de plus en plus de pression. Les besoins d’engagement nécessaires à la performance des entreprises amènent les dirigeants à porter leurs efforts sur les motivations intrinsèques des salariés;
Les motivations intrinsèques situées à l’intérieur des personnes sont les seules véritablement motrices. On peut les solliciter selon Kenneth Thomas (2009) avec quatre leviers principalement : en procurant aux équipes la capacité à faire sens, en leur offrant la possibilité de faire des choix, de déployer leurs compétences et d’effectuer des progrès.
Or les efforts de rationalisation qui ont conduit à introduire en masse des process se sont souvent faits au détriment de la dimension humaine. Cette dimension humaine s’inscrit dans un champ ancien dans l’histoire de l’humanité, mais assez nouveau dans le management : la spiritualité. On attend donc beaucoup des dirigeants dans ce domaine.
La méthode
L’ouvrage : « diriger avec son âme – leadership et spiritualité, présenté par Catherine Voynnet Fourboul traite de la dimension spirituelle des dirigeants particulièrement lorsqu’ils vivent un certain nombre d’épreuves.
21 dirigeants ont donc fait l’objet d’une recherche approfondie à propos des difficultés qu’ils pouvaient rencontrer et la façon dont ils pouvaient rebondir par rapport à ces difficultés.
Les constats produits dans l’ouvrage
Les dirigeants ont des définitions très contrastées de la spiritualité qu’il s’agisse de tout ce qui n’est pas matériel, de ce qui exprime un lien avec Dieu ou quelque chose de plus grand que soi, d’une forme de transcendance, d’une source intérieure d’inspiration, de la quête du sens de la vie pour n’en citer que quelques-unes…
Parmi les épreuves, véritables passages de leadership, que les dirigeants ont accepté de commenter, on trouve :
« avoir un mauvais superviseur »
« vivre une épreuve bouleversante »
« trouver un équilibre entre vie professionnelle et vie privée »
« faire face au manque de reconnaissance »
« reprendre et transmettre une entreprise »
« prendre des décisions difficiles et échouer »
Chaque passage fait l’objet d’un commentaire et de pistes de résolution selon les théories du comportement organisationnel. Les épreuves pour la partie spirituelle amènent également un questionnement ainsi qu’une transformation personnelle.
Après avoir développé l’histoire personnelle de chaque épreuve, les dirigeants expriment la manière dont ils ont fait face et dont ils ont sollicité leur spiritualité. Alignement, compassion et adoption d’un style optimiste constituent le cadre global de leur activation spirituelle.
Ces dirigeants à qui tout n’a pas réussi, sont justement dotés des caractéristiques les distinguant des autres et ils sont remarqués par leur exemplarité. Etre un modèle pour les autres suppose des vertus et des valeurs (sagesse, ouverture d’esprit, aimer apprendre, authenticité, courage, zest, gentillesse, gratuité, équité, pardon, humilité, goût pour la beauté, gratitude, humour) qu’ils ont développées durant ces passages et surtout une attitude bienveillante afin de rééquilibrer les pressions subies par les salariés dans l’entreprise. La stratégie de bienveillance n’est pour autant pas sans paradoxe et sa percolation organisationnelle est loin d’être suffisante pour garantir les aspirations d’une société à une certaine qualité de vie au travail.
La spiritualité n’est pas un cheminement qui va de soi dans une société laïque qui confond souvent religion et spiritualité. La rationalité cartésienne constitue un idéal culturel hérité des lumières qui a produit de grandes avancées dans le développement de la société et des entreprises. Mais un ancrage trop rigide à ce stade conventionnel ne facilite pas l’accès à un stade transrationnel et spirituel.
Enfin dans un monde très internationalisé, de multiples occasions de rencontres entre occidentaux et orientaux amènent à découvrir les différences culturelles ainsi que les religions qui ont conduit à des spiritualités à la source de différences. Ces distinctions peuvent accélérer les prises de conscience et les évolutions spirituelles.
Message conclusif
L’univers spirituel se révèle d’une grande force et d’une grande utilité pour les dirigeants et leur action dans les entreprises. Il contribue également à faire naitre un nouveau modèle de leadership spirituel rassemblant à la fois les apports à propos du leadership authentique et du servant leadership dépassant ainsi les faiblesses du leadership transformationnel.
Au chapitre des limites, il reste que le mot spirituel appartient jusque-là pour beaucoup à un registre trop intime pour être diffusé et partageable sans réserve et que l’offre d’accompagnement au développement du leadership spirituel en France est à construire.
Catherine Voynnet Fourboul
Maître de conférences Université Panthéon-Assas Paris 2
http://voynnetf.fr
[email protected]
Pour plus d'informations, découvrez l'interview de Catherine Voynnet Fourboul sur le site jobsferic.fr :
http://www.jobsferic.fr/article_119-Leadership-et-spiritualite-vont-ils-de-pair-.html?PHPSESSID=jkkv40jlmere664d79srf9p8m2